Il fait beau, aujourd’hui. Magnifique, même. Un peu chaud, par contre. Le soleil est bien là, il n’y a pas un seul nuage dans le ciel. L’ombre des arbres fait du bien. Cette journée de Novembre rappelle l’été passé, comme une petite carte postale qu’on garde en souvenir. Les étudiants sont tous de sortis, durant cette pause de midi. Ils se prélassent au soleil ou à l’ombre. Ca rit, ça crie, ça court en tout sens, comme des enfants en bas âge. Mais ne sont-ils pas jeunes, en réalité ? Face à mes 135 ans d’existence… Mais qu’ils profitent donc de cette jeunesse débordante d’énergie ! La vie humaine passe si vite, ils auraient tort de ne pas la vivre à fond.
Vêtue d’une robe blanche en coton chaud étonnamment dénudée pour une fois, je me balade à travers le campus pour fixer des affichettes partout. Ne vous méprenez pas sur la robe, par contre. J’ai l’habitude de porter des robes qui vont du cou jusqu’aux pieds. Cette fois, elle s’arrête aux genoux et dévoilent mes bras. J’ai même eu l’audace de faire un laçage en ruban dans le dos, découvrant un peu plus de peau. L’avantage d’être prof, c’est qu’on est plus obligé de porter l’uniforme. Et puis, je n’ai pas cours de la journée, l’un de mes rares moments de tranquillité. Bien que mes cours soient en général pas mouvementé, puisqu’il n’y a personne ou presque. Mon grand chapeau de paille m’évite d’être aveuglée, tandis que je traverse une zone sans arbres, les affichettes sous le bras. Elles ont été faites par une de mes rares élèves qui vient en cours, pour présenter notre projet. Cette élève fait également parti du club de loisir en plein air, une aubaine.
Il y a quelques temps, nous avions fait un projet caritatif à l’intention d’une association d’enfants défavorisés. En cours, nous avions cousus des doudous et nous les avions apportés. Nous avions été cinq à participer, mais nous avions fait des dizaines de peluches colorées, qui avaient fait le bonheur de leur nouveau propriétaire. Aujourd’hui nous avions décidés d’organiser un nouveau projet ; rénover de vieux objets pour les donner à la même association. Nous avions déjà récolté tout un tas de meubles usés et même quelques bijoux noircis. Il nous manquait maintenant que de la main d’œuvre pour mener à bien notre projet.
J’accroche l’affiche à un arbre, grâce à un système de corde. Plastifiée, elle résistera au mauvais temps. Colorée, elle attirera le regard. Mais concrètement, je ne sais pas ce qu’il y a marqué dessus. Je suis incapable de déchiffrer les symboles. J’en connais la teneur, mais pas le détail. « Rien ne se perd, rien ne se créer, tout se transforme : venez nous aider à rénover ! Tout sera ensuite donné à l’association de Shisaido pour les enfants défavorisés ! » Quelque chose dans le genre. Il y avait également une jolie photo de la salle de classe, encombrée de mobilier et de choses en tout genre, prêts à être rénovés, avec quelques élèves souriants dessus. Il n’y aura certainement pas foule pour nous aider, mais si ces affiches peuvent drainer encore quelques élèves…